Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, le 02 octobre 2024, des prévisions macroéconomiques, de la cohérence de l’article liminaire du PLF et du PLFSS pour 2025, au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel et de dépenses des administrations publiques, ainsi que du réalisme des prévisions de recettes et de dépenses contenues dans ces deux projets. Cette saisine a été accompagnée par des réponses aux questionnaires adressés par le Haut Conseil aux administrations compétentes.
Le Gouvernement a saisi le Haut Conseil des finances publiques de projets de loi de finances et de financement de sécurité sociale pour 2025. Ceux-ci confirment pour 2024 une dégradation pour la deuxième année consécutive du solde public (prévu à -6,1 points de PIB), et prévoient de ramener le déficit à 5,0 points de PIB en 2025 grâce à un ajustement budgétaire massif en 2025 (-1,1 point de PIB). Cela marquerait une inflexion de tendance par rapport à ces deux dernières années. Le Haut Conseil constate que le déficit public pour 2024, prévu à 4,4 points de PIB en projet de loi de finances pour 2024est désormais prévu à 6,1 points, soit un écart de 1,7 point de PIB par rapport à la prévision initiale et une dégradation de 0,6 point par rapport à 2023. Il souligne la nécessité, confortée par les dérapages majeurs en 2023 et 2024 des finances publiques, de retenir des hypothèses prudentes, notamment en matière de prévision des recettes ou de ralentissement des dépenses des collectivités locales. Il regrette enfin que la préparation du PLF et du PLFSS pour 2025 n’ait pas été accompagnée de mesures de frein plus efficaces au deuxième semestre 2024.
Le Haut Conseil estime que les prévisions de croissance (1,1 %), de masse salariale (2,9 % dans les branches marchandes non agricoles) et d’inflation (2,1 %) du Gouvernement pour 2024 sont réalistes. Il considère que la prévision de recettes, de dépenses et donc de solde public pour 2024 est encore affectée d’une incertitude non négligeable, mais est cohérente avec les informations comptables et budgétaires disponibles et avec le scénario macroéconomique. En revanche, il estime que le scénario macroéconomique pour 2025 est dans l’ensemble fragile. La prévision de croissance pour 2025 (1,1 %) apparaît en premier lieu un peu élevée compte tenu de l’orientation restrictive du scénario de finances publiques associé. Pour compenser cet impact restrictif, la prévision de croissance pour 2025 retient des hypothèses favorables sur le commerce mondial, l’investissement des entreprises et la baisse du taux d’épargne des ménages, qui correspondraient à une nette accélération de l’activité sans ajustement budgétaire. En dépit du soutien que peut apporter la baisse des taux d’intérêt, une telle accélération apparaît optimiste au regard des indications données par les enquêtes de conjoncture disponibles.
La prévision de masse salariale pour 2025 (2,8 % dans les branches marchandes non agricoles) est un peu optimiste, du fait à la fois de la prévision d’emploi, en lien avec l’appréciation portée sur le PIB, et de celle du salaire moyen par tête. Enfin la prévision d’inflation (+1,8 %) paraît un peu élevée au regard de l’ampleur du mouvement de désinflation observé depuis le début de cette année.
S’agissant du réalisme des prévisions de recettes et de dépenses sur lesquelles reposent le PLF et le PLFSS pour 2025, le Haut Conseil relève que, malgré ses demandes, l’information qui lui a été communiquée n’est pas suffisante pour apprécier les mesures de hausse des prélèvements obligatoires et de freinage de la dépense, d’un montant très important. De surcroît, le solde présenté dans l’article liminaire de ce projet (-5,2 points de PIB) est, de manière inédite, différent de celui sur lequel le Haut Conseil est appelé à se prononcer (-5,0 points de PIB).
Le Haut Conseil relève que l’ajustement structurel de 1,2 point de PIB en 2025 suppose un effort structurel de 1,4 point (42 Md€) compte tenu de l’impact négatif à hauteur de 0,2 point d’une croissance spontanée des prélèvements obligatoires, à législation constante, inférieure à celle du PIB. Cet effort repose à 70 % sur des hausses de prélèvements obligatoires (30 Md€, soit un point de PIB) et à 30 % sur les dépenses (12 Md€, soit 0,4 point de PIB). Ces proportions diffèrent de celles retenues par le Gouvernement qui, sur la base de modes de calcul différents, estime que l’effort de consolidation budgétaire s’élève à 60 Md€, se décomposant en 40 Md€ de réduction de dépenses et 20 Md€ de hausse de prélèvements obligatoires.
Selon les prévisions du Gouvernement, le ratio de la dette au PIB recommencerait à croître en 2024 et en 2025, pour retrouver le point haut atteint lors de la crise sanitaire à près de 115 points de PIB. La soutenabilité à moyen terme des finances publiques appelle à une vigilance accrue et des efforts immédiats et soutenus dans la durée. La France doit impérativement respecter la trajectoire du plan budgétaire et structurel à moyen terme, pour garder le contrôle de ses finances publiques, maîtriser son endettement, tout en finançant les investissements prioritaires et en veillant à ne pas trop affecter son potentiel de croissance.