Avis relatif au plan budgétaire et structurel à moyen terme 2025-2028

Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, le 02 octobre 2024, des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le plan budgétaire et structurel à moyen terme 2025-2028 de la France et de la cohérence de la programmation envisagée au regard des engagements européens du pays.

Synthèse de l'avis

La réforme de la gouvernance économique européenne adoptée en avril 2024 prévoit que le Gouvernement transmette cet automne à la Commission européenne un plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT) visant notamment à placer la dette publique sur une trajectoire soutenable. Le Haut Conseil des finances publiques se félicite que le Gouvernement ait décidé de le saisir de ce plan budgétaire, alors que cette saisine n’est rendue obligatoire par les règles européennes qu’à partir de l’année 2032.

Le Haut Conseil regrette toutefois que les informations transmises dans ce cadre soient insuffisantes pour lui permettre d’apprécier le réalisme de la trajectoire pluriannuelle inscrite dans ce PSMT. En particulier, le Gouvernement n’a pas détaillé la composition de la croissance au-delà de 2025 ni ses hypothèses sur le revenu des ménages et des entreprises. Il n’a pas non plus communiqué au Haut Conseil les réformes et investissements que la France s’engagerait à mettre en œuvre pour bénéficier d’une extension de 4 à 7 ans de la période d’ajustement budgétaire, ni indiqué la manière dont la France entend réduire son déficit public à l’horizon du plan. Ces éléments sont pourtant indispensables au Haut Conseil pour apprécier le réalisme de la trajectoire. Dans ces conditions, il est difficile pour le Haut Conseil de remplir pleinement sa mission d’information auprès du Parlement et des citoyens sur les prévisions macroéconomiques et de finances publiques du Gouvernement. 

La principale donnée sur laquelle le Haut Conseil est en mesure de se prononcer est celle de l’estimation du PIB potentiel sur laquelle le Gouvernement fonde sa trajectoire de croissance effective.

Le Haut Conseil relève que l’évaluation par le Gouvernement de la croissance potentielle, c’est-à-dire la croissance que connaîtrait l’économie en l’absence de choc conjoncturel, a été révisée en baisse par rapport à ses évaluations précédentes (1,2 % entre 2024 et 2028 au lieu de 1,35 %) et fixée à une valeur un peu plus faible ensuite (1,0 %). Il note que l’évaluation par le Gouvernement de l’écart de production en début de trajectoire qui, lorsqu’il est négatif, laisse attendre une croissance temporairement supérieure à la croissance potentielle, a aussi été révisée dans un sens moins favorable que l’évaluation présentée dans le Programme de stabilité (-0,6 % au lieu de 1,1 % en 2023).

Le Haut Conseil considère que le nouveau scénario de PIB potentiel, quoiqu’encore un peu optimiste, est désormais raisonnable, même s’il serait nécessaire pour l’apprécier pleinement de connaître le détail des réformes et investissements et la composition de l’ajustement budgétaire prévus par ce plan.

Le Haut Conseil dispose de peu d’informations pour évaluer le scénario macroéconomique. Il relève toutefois que le scénario de croissance effective est optimiste. En effet, il suppose que l’ajustement budgétaire inscrit dans la prévision ne l’empêchera pas d’atteindre, et même de dépasser en début de période, la croissance potentielle, même si une orientation plus accommodante de la politique monétaire peut venir le compenser en partie.

L’information disponible sur les finances publiques est plus lacunaire encore et ne permet pas au Haut Conseil d’apprécier le réalisme de la trajectoire présentée au-delà de 2025.

Le Haut Conseil constate toutefois que la date prévue du retour du déficit sous le seuil de 3 points de PIB a été décalée de deux ans, passant de 2027 dans le Programme de stabilité à 2029 dans le plan budgétaire et structurel à moyen terme, ce qui paraît plus réaliste.

En conséquence, le ratio de dette publique visé dans ce plan augmente jusqu’en 2027 et ne commencerait à baisser qu’en 2028. Du fait de la progression du niveau d’endettement et des taux longs, la charge de la dette des administrations publiques progresserait fortement pour atteindre 3,5 points de PIB en 2031, contre 1,9 point de PIB en 2023.

La prévision d’une amorce de décrue du ratio de dette en 2028 est affectée par l’incertitude qui entoure la prévision de déficit public. En particulier, tout écart à la prévision de déficit inscrite dans le projet de loi de finances pour l’année 2025 risquerait de retarder l’horizon de retour à un déficit inférieur à 3 points de PIB et de reporter la réduction du ratio de dette au-delà de 2028. Le Haut Conseil estime dans son avis 2024-3 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2025, que le risque que cette prévision soit dépassée est élevé.

Les marges de manœuvre pour faire face à un choc conjoncturel qui surviendrait dans les années à venir sont ainsi extrêmement réduites.

Le Haut Conseil rappelle avec force que la soutenabilité à moyen terme des finances publiques appelle à des efforts immédiats et soutenus dans la durée. La France doit impérativement respecter la trajectoire du plan budgétaire et structurel à moyen terme, tout en continuant à financer les investissements prioritaires et en veillant à ne pas affecter son potentiel de croissance.